«Huit années se sont écoulées depuis que j’ai publié la Lettre encyclique Laudato si’, voulant partager avec vous tous, frères et sœurs de notre planète éprouvée, mes profondes préoccupations concernant la sauvegarde de la Maison commune. Mais je me rends compte au fil du temps que nos réactions sont insuffisantes alors que le monde qui nous accueille s’effrite et s’approche peut-être d’un point de rupture». (LD #2)

L’exhortation apostolique Laudate Deum (Louez Dieu) qui précise et complète l’encyclique Laudato si’ de 2015 est parue mercredi 4 octobre 2023, en la fête de saint François d’Assise. L’engagement à prendre soin de la Maison commune découle de la foi chrétienne, y assure le pape.

En seulement à peine plus de 20 pages, le pape réexamine les données scientifiques et les preuves indéniables de la crise climatique tout en appelant «toutes les personnes de bonne volonté» à agir dans l’urgence, parce «qu’il n’y a pas de changement durable sans changement culturel, sans maturation du mode de vie et des convictions des sociétés, et il n’y a pas de changement culturel sans changement chez les personnes.» (LD #70)

Une urgence et une espérance! Trois clés de lecture pour l’exhortation, par Grégoire Catta, s.j, Directeur du Service national Famille et Société

L’urgence. Il y a urgence! Nous ressentons déjà les effets dévastateurs des bouleversements climatiques dus à l’action humaine. «Nos réactions sont insuffisantes alors que le monde qui nous accueille s’effrite et s’approche d’un point de rupture» (2). Il y a urgence, et c’est ce qui motive cette nouvelle exhortation du pape mais le changement de nos modes de vie est possible, une prise de conscience et une conversion individuelle et collective sont possibles. Très concrètement, «si nous avons confiance dans la capacité de l’être humain à transcender ses petits intérêts et à penser en grand, nous ne pouvons renoncer à rêver que [la COP28 à Dubaï dans quelques semaines] conduira à une accélération marquée de la transition énergétique, avec des engagements effectifs et susceptibles d’un suivi permanent». Le sentiment d’urgence qui marque tout le document est donc aussi l’occasion d’un témoignage d’espérance.

Un problème humain et social. Ce sont les personnes les plus vulnérables qui subissent les premières et le plus fortement les effets du changement climatique. «Les attaques contre la nature ont des conséquences sur la vie des peuples» (3) souligne le pape en citant les évêques d’Amazonie. «Tout est lié» et «personne ne se sauve seul» (19). Le sujet n’est pas «uniquement environnemental, ‘vert’, romantique» mais «il s’agit d’un problème humain et social aux multiples aspects» (58). Dans le diagnostic comme dans les actions à mener c’est bien nos responsabilités et nos capacités humaines qui sont en jeu.

Les motivations de la foi. Pour les chrétiens, des motivations naissent de la foi qui «donne non seulement des forces au cœur humain, mais […] transforme toute la vie, transfigure les objectifs personnels, éclaire la relation avec les autres et les liens avec toute la création» (61). À la lumière de la foi, en imitant Jésus «qui était lui-même en contact permanent avec la nature et y prêtait une attention pleine d’affection et de stupéfaction» (64), le chemin d’une réconciliation avec «le monde qui nous accueille» s’ouvre à nous. Il y a là un puissant moteur pour le changement des personnes sans lequel un changement culturel indispensable n’est pas possible. «Louez Dieu!» invite le pape, en prenant saint François d’Assise pour modèle, car «un être humain qui prétend prendre la place de Dieu devient le pire danger pour lui-même» (73).