Évêque de Nice de 1896 à 1925

Fils d’un sous-lieutenant, il fait ses études secondaires au lycée de Saint-Brieuc, puis entre au grand séminaire d’Orléans où sa famille avait déménagé. Ordonné prêtre le 22 mai 1869, il est nommé vicaire à Sandillon, puis à Saint-Marc en 1871. Quelques semaines plus tard, il est transféré à la paroisse Saint-Paterne d’Orléans. En 1874, il devient vicaire à la cathédrale et assure les fonctions de secrétaire particulier de Mgr Dupanloup dont la personnalité le marque profondément. Il est nommé en 1884 aumônier de la Visitation et se consacre alors essentiellement à l’étude. Ami du vicaire général Laroche, il accompagne ce dernier lorsqu’il est nommé évêque de Nantes en 1893 et devient son secrétaire particulier. Mgr Laroche le nomme chanoine et le fait entrer dans son conseil avec le titre de vicaire général honoraire.

Libéral dans la tradition de Dupanloup, rallié aux institutions républicaines, l’abbé Chapon fait figure de candidat idéal pour l’épiscopat. L’administration des cultes pense d’abord à lui pour Laval, où le cardinal Meignan l’aurait souhaité comme suffragant, mais c’est finalement sur le siège de Nice que l’abbé Chapon est nommé le 30 mai 1896. Sacré à Orléans le 29 septembre, il arrive dans son diocèse le 22 octobre. Il y impose une direction exclusivement française et entreprend, dans un souci d’union nationale, de fusionner les membres du clergé des deux rives du Var, au risque de froisser les sentiments italiens très influents encore au sein du chapitre. Ses efforts se portent également en direction de l’enseignement. Préoccupé par la baisse des vocations, il tente de renouveler les études au grand séminaire, réorganise les catéchismes paroissiaux, multiplie les occasions d’instruire son clergé et ses fidèles par le biais de cours supérieurs de religion, de congrès diocésains, de missions périodiques et de conférences. Ses talents d’orateur se vérifient aussi bien dans ses allocutions que dans ses mandements, qui restent des modèles de doctrine. La fermeté de cet enseignement permet que le diocèse échappe aux déchirements du modernisme. Sur le plan social, Mgr Chapon soutient chaleureusement le mouvement des démocrates chrétiens et du Sillon, avant de s’en détacher après la condamnation pontificale de 1910.

Sur le plan politique, le climat tendu qui précède la Séparation révèle la pugnacité de l’évêque et lui donne de faire entendre sa voix au-delà des frontières diocésaines. Dans sa lutte contre la politique anticléricale du gouvernement, Mgr Chapon se montre intransigeant au point de refuser en janvier 1901 la croix de la Légion d’honneur dont Waldeck-Rousseau veut le décorer. En août 1902, il rédige avec Mgr Bardel et Mgr Petit la pétition adressée aux Chambres en faveur de la liberté des congrégations, qui recueille 74  signatures dans les rangs de l’épiscopat. En réaction, Émile Combes le fait traduire devant le Conseil d’État qui le condamne pour abus et le prive de son traitement en décembre 1902. Mgr Chapon n’en continue pas moins de protester contre l’interdiction des congrégations enseignantes. En vain, il écrit aux parlementaires niçois pour les inviter à s’opposer au projet de loi de séparation. Après le vote de celle-ci, il prêche à ses curés la conciliation afin d’éviter tout incident avec les forces de l’ordre. Convaincu de la nécessité de sauver ce qui peut l’être, Mgr Chapon se dit favorable à la création d’associations cultuelles, telles que les prévoit la loi de 1905 pour recueillir les biens de l’Église. Lors de la première assemblée plénière de l’épiscopat qui se tient à Paris en mai 1906, il défend vigoureusement le projet de cultuelles canoniques élaboré par Mgr Petit. Il s’incline toutefois, comme l’ensemble de ses confrères, après l’interdit posé par Pie X dans l’encyclique Gravissimo d’août 1906. Ce n’est qu’au lendemain du Premier Conflit mondial que Mgr Chapon reprend le dossier des cultuelles, à l’invitation discrète de Benoît XV. Dans un contexte politique et religieux apaisé, il soumet en 1920 un projet de «diocésaines» qui est approuvé par Pie XI en 1924.

Décoré de la Légion d’honneur par le président Deschanel en 1920 pour son patriotisme durant la guerre, Mgr Chapon est nommé assistant au trône pontifical par Benoît XV l’année suivante. Le 26 octobre 1923, il obtient un auxiliaire en la personne de Mgr Louis Ricard à qui il délègue peu à peu l’administration du diocèse jusqu’à son décès le 14 décembre 1925. Pasteur attentif et clairvoyant, ferme dans ses principes mais privilégiant toujours l’entente à la rupture, il demeure l’une des figures marquantes de l’épiscopat du début du XXsiècle.

Extraits de la notice du Dictionnaire des évêques de France au XXe siècle, sous la direction de Dominique-Marie DAUZET et Frédéric LE MOIGNE, Cerf, Paris, 2010.

Séverine BLENNER-MICHEL

Armes de Mgr Chapon

Devise : Pax in justitia et caritate
« Paix dans la justice et la charité »

D’azur, à la colombe d’argent, volant en bande vers une mer du même, tenant un rameau d’olivier dans son bec, et accostée en chef de deux étoiles aussi d’argent, l’une à dextre l’autre à senestre ; au chef de Bretagne, c’est-à-dire d’hermines.