Le 6 janvier, nous fêtons l’Épiphanie. Trois rois mages et une galette. Finalement, quel est le sens de cette fête ? Nous avons posé la question au père Félix Baudoin, vicaire à la paroisse Saint Jérôme, responsable de la pastorale des sectes, nouvelles croyances et dérives sectaires, et responsable de l’œcuménisme.

Lorsque j’entends ce mot, je suis partagé entre la « galette des rois » selon la coutume populaire, et l’évocation d’un « midrash » par les doctes biblistes : ce genre littéraire inspiré du prophète-visionnaire Isaïe, montage – message voulu par Matthieu (2) pour les pagano-chrétiens que nous sommes. Attention, il ne s’agit pas de « rois mages en Galilée » mais d’astrologues perses guidés par une étoile (de Jacob, de David ?) jusqu’en Judée.

Appartenant aux riches savants de l’Orient polythéiste, ils arrivent de loin pour découvrir et vénérer un bébé fragile et dépendant de sa mère, Marie, dans la « maison » qui a succédé à la crèche de Bethléem. Ils complètent les adorateurs de l’enfant-Dieu, des bergers juifs, pauvres, ignorants et méprisés : le Seigneur ne vient-il pas visiter son peuple et tous les peuples ?

Plus tard, on parla de trois mages puisqu’ils apportaient trois présents : de l’or, symbole royal, de l’encens en l’honneur de Dieu et de la myrrhe pour une sépulture à venir. « Tu ne peux sans doute emporter beaucoup de bagages, et tu en perdras bien d’autres en chemin. N’importe, va de l’avant. L’or de l’amour, l’encens du désir, la myrrhe de la souffrance, tu possèdes déjà tout cela. Il acceptera tout cela. Et nous finirons par le trouver » (Karl Rahner).

Blanc, jaune et noir, comme l’illustrent nos chers santons de Provence, les mages nous représentent à cette Nativité, accueillant Celui qui doit changer le cours de l’Histoire !

Alors, quelle histoire que cette galette pour laquelle je me suis souvent mis sous la table au temps de ma souple jeunesse : chaque convive a une chance de tomber sur la fève, tout comme chaque homme de bonne volonté peut rencontrer et suivre le Maître de la Vie ! Dans une société qui n’est plus aussi naturellement religieuse que dans l’Antiquité, quelle joie que cette épiphanie : elle n’est pas un simple épiphénomène mais une théophanie manifestant un Dieu proche, incarné, solidaire de ses créatures, de ses enfants en Jésus-Christ ! Comment refléter cette étoile discrète jusqu’à ce qu’elle soit « soleil de justice » brillant pour les nouveaux continents que sont la mondialisation, la communication, la bioéthique ?

Oraison du Carmel de Mazille (Saône-et-Loire)

Dieu, il y a des mages en notre temps, leur langage est scientifique, technique ou informatique. Ils ont depuis longtemps jugé incompatible de pouvoir croire aux étoiles. Dieu, aujourd’hui comme hier, et plus qu’hier peut-être, les hommes te cherchent éperdument. Ils te somment de t’expliquer ou ils tentent de se résigner au néant. Dieu, nous ne te demandons pas de donner des réponses toutes faites ou immédiates – même si le temps nous semble interminable parfois ! – mais nous te demandons de ne pas nous laisser sans lumière, simplement pour que notre humanité puisse poursuivre sa quête et sa marche, avec ce presque rien de confiance qui suffit !